Il y a des festoù-noz où l’on se rend par habitude, des dates gravées, des incontournables du calendrier. Le fest-noz de Cléguérec, entre Noël et le 1er de l’an fait partie de ceux-là. Cependant, cette année, cet événement avait un goût particulier. L’association En Arwen, qui porte depuis des années le festival de Kleg, rencontrait de sérieux soucis financiers que la dernière édition du festival n’avait fait qu’accentuer et la soirée du 29 décembre avait ainsi pour but de récolter des fonds pour « Sauver Kleg ». Alors quand on peut cumuler plaisir et bonne action, on n’hésite pas !
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Arrivés vers 17h à la salle des fêtes, les festivités ont déjà commencé depuis un moment et à priori, les danseurs étaient au rendez-vous depuis l’ouverture des portes en début d’après-midi. On arrive à temps pour le passage de Barok, un groupe qui mériterait de tourner d’avantage et qui propose une musique à danser de qualité. Ça swingue, tout en nuances et en douceur. Idéal pour démarrer cette longue journée. On enchaine avec Arnaud Royer en solo qui joue pour et avec les danseurs, puis A-Dailh qui propose des airs à consonance irlandaise. Pas encore franchement la foule (on espère que ça viendra par la suite, étant donné l’enjeu de la soirée), mais assez de monde pour que l’ambiance soit là, sur le parquet comme à la buvette.
Au bar, justement, on s’affaire déjà, les bonnes odeurs de grillades parviennent jusqu’à la salle, ouvrent l’appétit des danseurs. Au menu, du classique, efficace et utile : galettes saucisses, frites, de la bière de Noël ou une blonde basique, le tout à des tarifs très raisonnables. Comme toujours, les équipes de bénévoles vous accueillent avec le sourire et la bonne humeur. Là aussi efficacité et plaisir vont de pair.
Vers 20h, le duo Le Bozec/Sibéril profite de l’afflux soudain de danseurs du début de soirée et mettra le feu au plancher. Difficile de rester insensible à ce couple qui offre une musique dynamique en associant deux instruments aussi différents qu’une cornemuse et une guitare. Quelques « Hir Hir » se font entendre, l’ambiance jusqu’alors assez calme gagnera en sourires et en convivialité. Les formations suivantes, Jean-Charles Guichen solo et le trio Sérot/Janvier/Martineau, finiront de transformer la salle des fêtes en dancefloor où le public s’amuse, se régale, se bouscule. Un peu trop par moments d’ailleurs. Parfois, ça devient compliqué de se danser, les rondes s’écrasent les unes contre les autres, les files manquent de se tamponner ou créent des goulots d’étranglement… Mais toujours avec le sourire !
Willy Pichard, musicien, bénévole préposé cette soirée-là au timing des groupes et dans l’équipe d’organisation, pose ensuite son chronomètre pour retrouver son compère Stevan Vincendeau sur scène. Leur passage est perturbé par un problème technique que diverses couches de scotch coloré ne parviennent pas à régler; pas grave, ça donne naissance à un joli moment de chant dans la ronde, spontané et convivial. Une fois solutionné le souci de sangle d’accordéon, le duo nous entraine, comme d’habitude sur des airs pêchus, originaux, qui filent la patate. Le temps de boire un verre au deuxième bar ouvert à l’autre extrémité de la salle et manger un bout, et on enchaine avec Landat/Moisson, tout juste arrivés de Poullaouen. Là encore, pas de déception, de la qualité, du plaisir, des émotions…
La fin de soirée s’emballe. La salle est comble, il y fait chaud. On rit entre amis, on danse… Sur scène, Startijenn, Kejaj et Hiks enchaînent leurs passages. On retrouve ces groupes avec un plaisir non dissimulé, on ferme les yeux pour savourer ces airs tant écoutés mais qui ne perdent rien de leur effet. Notre coup de cœur historique pour Kejaj que décidément, on n’entend pas assez souvent n’est absolument pas démenti. C’est beau, c’est savoureux, ça fait frémir les orteils et les tripes… Félicitations à Willy Pichard qui ce soir-là a dégainé le bouzouki pour remplacer l’irremplaçable Ronan Pellen! Il l’a fait! Entre les « grosses » formations, sur l’avant-scène, les couples de sonneurs Mahé/Lothout et les chanteurs continuent de nous faire danser pendant que les techniciens s’affairent. Quelle qualité, quel professionnalisme !
Il est pourtant indispensable de préciser que ce 29 décembre à Kleg, tout le monde était bénévole. Koroll Sonorisation avait mis à disposition tout le matériel et une dizaine de techniciens, les soixante musiciens s’étaient déplacés gratuitement… Nos petits dix euros d’entrée n’avaient pour but que de permettre à En Arwen de remettre le pied à l’étrier et nous proposer pour encore plusieurs années un festival de qualité avec une programmation éclectique et originale. Et ça a fonctionné ! La presse locale a annoncé dans les premiers jours de 2019 que le Festival En Arwen était sauvé… On s’en félicite et on remercie tous ceux qui, depuis des mois se battent pour Kleg. Chapeau bas !