Il est des groupes qui marquent de manière importante le paysage musical d’une époque. En dix ans d’existence, Gwenfol a marqué les années 1990, laissant une empreinte savoureuse que les danseurs n’ayant pas eu l’occasion de les voir sur scène rêvent de découvrir.
Rencontre avec Yannig Noguet, un des fondateurs du groupe, avant les retrouvailles avec celui-ci samedi prochain pour le « vintage noz » du festival de Kleg.
Peux tu nous retracer l’historique du groupe, nous raconter comment tout a commencé?
Yannig Noguet : Tout a débuté par un duo qu’on a créé avec Jean-Pierre Andrieux (violon) et moi, en 1991, je crois, à l’époque des francs quoi. A l’époque j’avais 13 ans. On a très vite eu envie de former un groupe et on s’est mis à la recherche de compères pour nous accompagner. A Muzillac, on a fait la rencontre d’Olivier Guénégo (guitare) et Gurvan Dréano (bombarde) qui ont tout de suite accepté de nous rejoindre. De quatre membres, on est assez vite passé à cinq. En effet, Jean-Pierre n’était pas toujours disponible et on faisait appel à Stéphane Le Dro (clarinette) pour le remplacer. Et finalement, Stéphane a fini par intégrer le groupe de manière définitive en 1993.
Vous étiez tous adolescents à cette époque. Aviez-vous réfléchi à la couleur que vous vouliez donner à Gwenfol, à votre répertoire ?
Y : En fait on ne se posait pas de question. On se faisait plaisir. On avait envie de faire de la musique, on en faisait. Il y avait une vraie insouciance, on ne se questionnait pas sur quel répertoire on allait jouer ou sur si on avait notre place là ou pas, on s’en fichait.
En même temps, si vous n’aviez pas eu votre place, vous n’auriez pas tourné autant et aussi vite.
Y : En effet, on a beaucoup tourné, très vite. C’était de belles années pour ça. Mais très franchement, nous on s’amusait, c’est tout. On ne se posait pas la question du jugement ou de la prise de recul sur notre musique. On jouait ce que l’on avait envie de jouer, on jouait la musique que l’on avait envie de jouer. Pour ma part, cela correspondait à la petite étoile qui était née dans mes yeux un soir de fest-noz alors que j’étais gamin, la certitude du «c’est ça que je veux faire ». On n’était pas un groupe qui réfléchissait à comment on construit un avenir. Tout était naturel !
On est donc dans le milieu des années 1990, période assez faste pour les festoù-noz. Comment expliques-tu cet engouement du public pour Gwenfol ?
Y : Je n’ai pas trop conscience de cet engouement, moi. Je suis bien incapable d’expliquer ce phénomène. On se rendait compte que notre musique plaisait, oui, bien sûr, mais c’est tout !
Gwenfol faisait partie des groupes qui tournaient le plus à cette époque. Raconte-nous un peu tout ça !
Y : A vrai dire on jouait essentiellement en Bretagne ou à Paris où, à l’époque, il y avait de nombreux festoù-noz. On faisait un aller-retour tous les mois ou tous les deux mois pour jouer ou à l’Elysée-Montmartre, ou dans d’autres fameuses salles parisiennes. On faisait des bus au départ de Bretagne avec les musiciens des autres formations invitées. C’était très très bien. Des anecdotes, sur cette période, il y en a plein ; des drôles, des pas drôles… Moi j’ai un excellent souvenir de la soirée du jeudi du festival des Transmusicales. Il y avait un concert d’ouverture où on laissait place à des groupes en devenir. Ce soir-là, on s’est retrouvés à jouer juste après Sergent Garcia, qui avait mis un feu comme ce n’est pas permis dans la salle de la Cité, et avant Rachid Taha. Et nous, au milieu, avec notre musique à danser que personne n’a dansée, mais qui avons mis aussi une ambiance extraordinaire.
Quelques mois après la sortie du premier CD, « Berdadaou », Jean-Pierre et toi quittez le groupe. Qu’est-ce qui a déclenché ce départ et la fin du Gwenfol historique ?
Y : Pour ma part, ce qui a motivé mon départ, c’est l’envie de faire autre chose. J’avais vingt ans et je me posais des questions sur ce que j’avais envie de faire. Et puis, on jouait beaucoup, beaucoup. On faisait une petite centaine de dates dans l’année. A l’époque on avait tous une activité parallèle à notre engagement dans Gwenfol. Certains étaient étudiants, moi je filais des cours d’accordéon. Ce n’était pas facile de se voir pour répéter. On se retrouvait le lundi pour ça, mais comme assez souvent on avait joué le samedi et le dimanche, ben, le lundi, la motivation manquait cruellement et on ne proposait rien de nouveau! Avec le recul, je me dis qu’on a cherché des solutions malgré tout. L’intégration des cuivres en 1998 a été vraiment chouette. Avec eux, la scène prenait une autre dimension, mais cela n’a pas suffi à combler mon envie « d’autre chose » !
La formation initiale de Gwenfol reprend du service pour le prochain festival de Kleg, dans moins d’une semaine. Est-ce que c’est la nostalgie qui vous a poussé à remonter sur scène ensemble ?
Y : Non, je ne suis pas du tout nostalgique. Mais les copains, on ne les oublie pas et je suis bien content qu’on se retrouve ! Et j’espère vraiment qu’on va retrouver cette insouciance qu’on avait à l’époque. Le but est vraiment de tenter de retrouver le Gwenfol d’antan, avec le même répertoire et tout. Le plus dur a été de retrouver les thèmes qu’on jouait à l’époque et qui n’avaient pas été enregistrés. Il a fallu faire du collectage, aller à la recherche de vieilles cassettes pour récupérer notre répertoire !